The Dandy Warhols – Thirteen tales from Urban Bohemia

Ne pas passer à côté de "Bohemian like you", du tandem "Godless"/"Mohammed" et "Get off".

Les Dandies ? La classe cool d’une bande de 3 mecs et 1 nana un peu dézingués, hirsutes et babas sur les bords. Un quatuor de cowboys junkies qui sait jouer un indie rock très teinté seventies sur ce troisième album classieux. Leur meilleur dans leur discographie entamée en 1995. Une oeuvre fondamentale du rock des années 2000. Un album aujourd’hui culte et déjà révéré à sa sortie en 2000. Et franchement il y a de quoi.

Sur ce disque, les Dandy Warhols (déjà le nom de groupe est tellement classe que cela suffit pour qu’on se lie d’amour avec eux) s’aventurent dans des terrains déjà défrichés mais qu’ils s’approprient avec style et élégance.

On démarre le roadtrip sur une attaque planante, psychédélique avec le tandem “Godless” et “Mohammed”. L’une des meilleurs attaques d’albums dans l’histoire du rock. Dans la cadillac rouillée qui sillone les contrées du coeur de l’Amérique, la trompette de “Godless” invoque un néo western rock couché sur un mur de guitares acoustiques. Le chant éthéré de Courtney Taylor appelle à la méditation. La chanson s’évanouit dans un fade out qui glisse immédiatement dans un trip orientalisé avec “Mohammed”. Le chant devient un murmure qui invite au voyage. Une guitare slide flotte dans un nuage de bandes acoustiques inversées du plus bel effet. Les percussions aposent leur rythme tribal. Les trompettes égrènent des airs qui nous plongent en pleine épopée Zapata, l’air chaud du Mexique souffle sur la route… Avec “Nietzche”, le périple plonge en enfer. Ambiance Tarantino dans “Une nuit en enfer”… Les Dandies assènent un “wall of sound” de guitares denses et obscures. L’heure est au bad trip. Le tempo est lourd, martelé, hypnotique. Le chant et les choeurs surnagent au milieu de cet enfer. Contraste saisissant entre cette ambiance de fin du monde et les choeurs envoûtés qui habillent la chanson.

Fin du premier acte. Les Dandies s’extirpent de l’apocalypse et posent le pied  à terre. Virée country rock avec “Country leaver”, pedal steel, claquements de doigts, grosse caisse pour donner le rythme. Les copains s’amusent et jouent de la slide en veux tu en voilà. C’est bon, c’est racé, ça claque, y’a du Grateful Dead dans les éménations. Un titre country à leur façon, un brin déjanté avec un Courtney Taylor au timbre je m’en foutiste. Passez moi la gnôle qu’on s’en rejette un petit. Ce sera donc le titre “Solid” qui prolonge le registre du formidable branleur. Un titre country/funk qu’un certain Beck aurait pu chanter sans problème. Avec du Lou Reed dans la voix. “I’ve got a new beautiful asian girlfriend” entonne Courtney Taloyr. Avec “Horse pills”, les Dandies concluent ce deuxième acte dans ce registre Beck/Lou Reed. Les guitares de Peter Holmström et Courtney Taylor sont heavy baby dans le genre The Stooges. La voix dispose de son flow hip hop. Les Dandies ont décidément leur style propre. Et ça dépote !

Avec “Get off”, premier tube du disque, les Dandies rempilent pour un tour western folk rock. Refrain addictif et mémorable, ça swingue côté rythmique. Les influences country ne sont pas loin encore une fois mais avec goût, subtilité dans les arrangements de cordes et de guirlandes de guitares tremoloes qui ornent le titre. Ambiance “Le bon la brute et le truand” : jouissif. Le beat se repose, on range les caisses de bourbon dans le coffre et on s’échappe le temps d’une virée sous les étoiles avec le magnifique “Sleep”. Un titre tout en simplicité dans la mélodie du chant et des arpèges mais aux arrangements cosmiques. Instant de lévitation, le regard figé dans une constellation abandonnée. Le titre s’évanouit dans un superbe final de choeurs élégiaques…

Le summum de la “coolitude” gagne la chanson “Cool scene”. Tempo fluide, orgue et trompette aux manettes, les Dandies filent sur la Californie bécanes en main. Americana west coast sous valium. Le bonheur est à portée de main. Les néo hippies sont dans la place. Ils l’investissement totalement sur le tubesque “Bohemian like you”. Une intro mythique de toms de batterie roulant sur une nappe d’orgue déroule le tapis rouge pour le riff de guitare malicieusement pompé sur “Brown sugar” des Rolling Stones. Refrain ludique et salvateur. Les Dandies signent le tube parfait. Avec “Shakin”, les deux guitaristes déroulent un jeu à la Brian Jonestone Massacre (groupe dont ils sont très proches, cf. l’excellent documentaire “Dig”). Courtney, roi des branleurs, is back. Quelques scratches de platine en amorce d’un solo noyé dans les delay. Les Dandies s’amusent avec quelques clins d’oeil modernes au milieu de cet album old school mais qui ne sonne pas rétro pour autant. Très malin. Astucieusement produit. Même inspiration du Brian Jonestone Massacre sur “Big indian”

Le disque s’achève sur une berceuse. “The gospel” conclue magnifiquement l’oeuvre des Dandies. Nappe de slides, un charley légèrement ouvert, une guitare à peine effleurée dans la rythmique, des lignes de chant aux mélodies à la fois gospel et années cinquante. Il y a aussi du Velvet Underground dans la manière d’intérpréter : une nonchalance dans le chant, une orchestration minimaliste mais qui n’en demande pas davantage pour insufler toute sa beauté à cette chanson. Avec “The gospel”, le quator de Portand termine son disque comme il l’a commencé : planant et grandiose.