Oasis – Standing on the shoulder of giants

On retiendra ces 5 excellents titres : "Gas panic", "Fuckin in the bushes", "Go let it out" "Who feels love", "Roll it over".

Année 2000, Oasis mark II met fin à sa première trilogie d’albums. Noel Gallagher décroche de la cocaïne après le délirium rock de « Be here now » qui fissura la carcasse insubmersible de son groupe. Il a par ailleurs collaboré par deux fois avec les Chemical Brothers en 1997 et 1999, ce qui l’influence certainement dans sa décision d’ouvrir la palette musicale de sa formation.

Owen Morris est congédié et remplacé par Mark Spike Stent aux commandes de la production du 4ème opus « Standing on the shoulder of giants ». Ce dernier réputé pour son travail avec Massive Attack, Bjork et U2 va donner une nouvelle identité sonore et plus moderne au groupe à l’image de l’excellente ouverture instrumentale du disque qui fit office de BO pour « Snatch » de Guy Ritchie : Fuckin in the bushes. Riff à la Jimmy Hendrix, basse totalement groove, samples,… Le titre étonne et rompt complètement avec le rock rétro auquel le groupe nous avait habitués. Go let it out au refrain héroïque suit dans la même veine avec son loop de batterie repiqué à Dr John (« I walk on gilded splinters »), son scratch de DJ en intro, ses nappes de mellotron et son riff de basse qui fait groover le groupe comme jamais.

Les sessions d’enregistrement se déroulent dans le sud de la France au Château de la Colle Noire, où Paul Arthurs, le guitariste rythmique du groupe, copain d’enfance, se verra remercier faute de s’impliquer sérieusement dans ce nouveau disque. La réalité est que Noel Gallagher impose un régime de sobriété drastique qui rompt avec les excès du passé à l’image de l’expérience de l’enregistrement de « Be here now » où il déclara ne se souvenir de rien en raison d’une consommation de substances illicites démesurée. Le bassiste, Paul McGuigan, autre pote de lycée, emboîtera le pas du guitariste dans la foulée. Le groupe se retrouve donc à trois avec le batteur Alan White.

La réussite de « Standing on the shoulder of giants » (titre emprunté à Isaac Newton) se trouve dans son atmosphère planante et sombre. A l’image de la teinte psychédélique qui lorgne du côté de l’époque hindouiste des Beatles avec Who feels love et ses boucles inversées, ses sitars et ses nappes de clavier ésotériques. Gas Panic décolle sur un beat groovy, s’en va surfer sur un solo d’harmonica trafiqué avant d’exploser sur un solo de wah-wah bien inspiré. Une flûte parachève ce morceau qui figure parmi les plus belles réussites du groupe. Le sous-estimé Roll it over qui clôt l’album s’inspire de Pink Floyd époque seventies. Noel Gallagher fait appel à PP Arnold (qui a officié auprès de Ike et Tina Turner, Small Faces, Eric Clapton,…) et Linda Lewis pour officier sur les chœurs de l’album, une vraie réussite en matière d’arrangements à l’image de ce Roll it over cosmique, transporté par un Liam Gallagher au chant envoûtant. Le groupe s’envole dans un final homérique au même titre que leur “Champagne supernova”. Little James, signée Liam Gallagher, est une bonne sucrerie britpop taillée dans l’écrin des Beatles (on pense à “Hey Jude” forcément).

Là où le disque s’embourbe, c’est en allant frapper à la porte d’un rock mainstream US grossier à l’image de l’épouvantable I can see a liar aux allures de rock sous testostérones, l’une des pires chansons du groupe. Ou lorsque le groupe manque cruellement d’inspiration et se contente de “fillers” comme sur Put yer money where yer mouth is pompé sur le “Roadhouse Blues” des Doors… C’est aussi lorsque la production manque de sobriété et abîme de jolis titres comme Where did dit all go wrong ? et Sunday morning call. Indigestes sur l’album, leurs versions unplugged sont tout le contraire… On regrettera aussi l’absence du magnifique Let’s all make believe qui figure en face B de Go let it out.

Cet album ne replacera pas Oasis sur son piédestal mais aura le mérite de tourner une page. Dans un effort plus que louable de s’offrir un nouveau son l’amiral Noel Gallagher opère également sa catharsis vis-à-vis du star system et du précepte sex drugs, rock and roll… D’où une œuvre teintée de noirceur. Album inégal de transition pour la 2nde partie de la carrière du groupe, « Standing on the shoulder of giants » n’en recèle pas moins quelques pépites, signe que le commandant en chef en a encore sous le coude.