Ty Segall – Manipulator

Les deux titres à écouter d'urgence :  Feel et Mister Main

Entorse au règlement, cette fois-ci, je vous propose de disséquer plus en détail le fabuleux Manipulator, sa progression et ses multiples influences.
Premier double EP de l’artiste accouché en 14 mois (son record personnel), il s’agit probablement de l’oeuvre la plus dense (56 min / 17 titres) et étrangement la plus facile d’écoute. Les chansons s’enchaînent, variées certes, mais articulées autour d’un son et d’un univers plus homogène.

L’ouverture de l’album use d’un son psyché (racines de Ty Segall) aux accents organiques entêtant. Les Doors ne sont pas loin et le ton semble être à l’imploration. Les notes vrombissent, un doux enchaînement de fuzz délirante en guise de solo.
Puis vient le temps de Tall Man Skinny Lady, structure et son à la T-Rex ou Bowie.

The Singer frappe à la porte, avec un son acoustique franc et grinçant, sorti tout droit d’une compo d’un Kurt Cobain. La pop anglaise n’est plus très loin, et pourtant l’univers reste personnel. On se prend à penser à Miles Kane (son/composition/arrangements), ce qui est forcément un compliment.

It’s Over est une urgence. Une tournerie bluesy (cherchez l’erreur) faisant chanter les lampes d’un ampli survitaminé. On pense à du Kasabian.

Feel. Continuation, plus acoustique et groovy. Led Zep et ses riffs d’anthologie s’approche, alliage de gras et de grave, une basse sursaturée accompagnant une voix haut perchée mais mélodieuse. 2’50: instant solo, mais de batterie s’il-vous-plaît. Comme on n’en fait plus. Woodstock devait peut-être ressembler quelque peu à cela.
Passons à The Faker, mélange d’Oasis et de Led Zep, autour d’une ballade sautillante.

Tournant de l’album grâce à The Clock et son solo aux sonorités subtilement orientales qui nous évoque les expérimentations des Beatles de l’époque. D’ailleurs Green Belly aurait pu être composée par Lennon.

Retour au furax et à l’huile de moteur avec The Connection Man, pour un temps seulement. Car Mister Main et son groove radioheadien nous ennivre, et exalte. Une bonne basse qui groove, en symbiose parfaite avec cette guitare frêle et cotonneuse.

The Hand semble alors nous ouvrir les portes de l’immensité à la Vedder. Mais c’était sans compter sans la surprise d’un groove qui transporte le titre ailleurs encore.

Susie Thumb est un bon rock’n’roll aux accents grunge. Quand Kurt rencontre Bill Haley, peut-être au pays des merveilles.

Don’t you want to Know m’évoque les Kinks et je ne saurais pas dire pourquoi. Peut-être est-ce d’ailleurs cela qui est intéressant.

Et je m’arrête là car je considère que l’album devrait alors finir.
13 titres si variés, si efficaces et sensibles, intelligemment composés et arrangés ne sont-ils pas suffisants?

Ty Segall, un artiste inspiré qui s’inspire en racontant un son nouveau.
Pépite.