Van Morrison – Moondance

Cet album est un tout, prenez n'importe quel titre, il vous rendra grâce...

Après sa courte carrière au sein du groupe garage/blues rock Them, le petit rouquin Van Morrison (qui se fit connaître avec le tubesque “Brown eyed girl” en 1967) emprunte une voie solo qui accouchera de deux chefs d’œuvre : “Astral Weeks” paru en 1968 et “Moondance” en 1970. Deux albums dont les influences se feront sentir jusqu’au plus près de nous avec des artistes de la trempe de Ray LaMontagne et Michael Kiwanuka. Van Morrison délaisse son blues rock furieux avec son ex-groupe Them (excellent groupe au passage avec le hit “Gloria”) au profit d’un répertoire mêlant Irish folk, soul, country, blues et jazz.

Entouré de musiciens émérites, Van Morrison assemble dans “Moondance” des chansons merveilleusement taillées pour vivre un parfait “summer in love” buccolique. Majesté des guitares acoustiques, cuivres langoureux, flûtes champêtres, basse sautillante, vibraphone, congas, clavecin,… tout est là pour déposer un doux baiser musical sur les lèvres de l’être adoré. Enregistré au village de Woodstock, où le chanteur/compositeur s’est exilé en compagnie de sa femme, on ressent cette douce quiétude qui berce chacune des chansons.

Chaque note se pare d’une radieuse luminescence, l’ambiance est à la joyeuse détente à l’écoute de “Glad Tidings”, Van Morrison nous enveloppe dans un cotonneux halo qui fait du bien. Son timbre de voix impose le respect, rocailleux, habité, bluesy et soul à la fois. Le type de voix du mec qui a tout traversé dans la vie (en atteste l’introspectif “And It Stoned Me” qui aurait pu être tout à fait chanté par Creedence Clearwater Revival à l’époque…) Sans doute ce lien du sang typiquement irlandais qui transpire dans les paroles et les cordes vocales à l’image de cet émouvant “Brand new day” porté par des choeurs tout en gospel. Emotion qui se fait plus grave avec le solaire “Into the mystic” qui provoque cette petite boule dans le ventre qui fait du bien… Une voix unique et magnifique qui n’appartient qu’à lui. Comment ne pas succomber à ce charmant “Crazy love” où Van Morrison déploie une interprétation pleine de soul. Cette voix murmurée toute en délicatesse… Subtil.

“Moondance” est un chef d’oeuvre, toutes les chansons sont de remarquables aquarelles composées avec soin, les arrangements du disque sont d’une exceptionnelle qualité à l’image du titre éponyme “Moondance”. Les saxos swinguent sur un air de piano et contrebasse tout en jazz. Une délicieuse pièce musicale qui rappelle combien les musiciens de cette époque dorée des sixties/seventies savaient jouer et composer des œuvres intenses, profondes, lyriques… L’irlandais est aussi un parolier hors pair, empruntant beaucoup aux références traditionnelles de la musique et poésie gaélique et celtique. De son encrier, il y prélève quelques gouttes de romantisme et de bohème comme dans la chanson “Caravan”. Une seule envie nous prend : foutre le camp, quitter cette ville frénétique, prendre son baluchon, empoigner Tom Sawyer par le bras et se faire la belle… Tout connement.

Pourquoi est-ce aussi un chef d’œuvre ? Les musiciens qui entourent Van Morrison. Une bande de mecs qui jouent en totale osmose, avec un feeling inégalable, sans automatisme, tout l’album swingue de bout en bout. Et la magie opère.

https://www.youtube.com/watch?v=LGu4E2058l8