A la base de ce groupe inconnu au bataillon, deux british prénommés Rhys. Amis de 14 ans, ils décident de former un groupe lors d’une soirée. Bien leur en a pris. La suite est un bidouillage éclairé dans un home studio de fortune (le fameux mythe de la cave), complété d’un recrutement assidu de musiciens live et studio (la boîte à rythme des débuts sera par exemple remplacé par un musicien en chair et en os). Au final, une somme d’inspirations digérées qui font place à une créativité éclairée. Un album de son temps.
“I don’t know”. Hâchures de flanger. Le son tourne et ensorcelle. A la manière d’une Melody Echo’s Chamber, la voix envoute. Douceur et incandescence. Les arpèges de guitare rayonnent quand la batterie devient voilée. Le moment est à la rêverie.
“Porcelain” est mixé précisément comme certains titres de Radiohead. La voix décore un fond travaillé de sons sphériques et spatiaux. Tout résonne et clignote. La reverb transporte et le delay hypnotise. Une belle entrée en matière qui ouvre notre réceptivité pour la suite. En douceur.
Un clavier ricoche, entre orgue et synthétiseur. Un son nouveau. Puis des accords égrenés au détour d’un son clair parfait. Une batterie marque un minimum de temps. La colonne vertébrale discrète d’un titre aux airs d’impro. “Circa 1954”.
“Strawberry Glue” prend des accents noise rock / shoegaze. On imagine une Jazzmaster bruitiste, un joyeux bordel.
“Beta Male” salit ce qu’il restait de net dans cet album. La fuzz tiraille les micros simples, un riff perché se décompose en notes indépendantes, la caisse claire explose en vrac, avant de s’assagir (2’37). Thurston Moore devrait aimer. Un équilibre clair/obscur précis et tenu.
“Nk” ronronne dès les premières notes. Un noise gate qui ne peut s’empêcher de laisser s’échapper un souffle discret. Puis un mur du son. Epoque Silverchair (souvenons-nous du son de l’intro de Freak, la belle époque capillaire innocente). Tout cela râpe le gosier mais s’adoucit d’incantations divines que Tom Yorke n’aurait pas reniées.
Lorsque le groupe s’essaye à la ballade, cela donne “Ultra Vivid”. Surtout Ultra Orange. Une certaine aisance débridée. Un apaisement sonore qui guérit le tympan précédemment agressé de parasites fuzz. Mais est-ce l’angle le plus intéressant pour apprécier le travail d’Ulrika Spacek? La boucle finale défile – et le temps avec elle – comme pour nous rappeler que le commencement n’est pas si loin.
“She’s a Cult” au regard des autres titres devient dispensable. Énergie brute en powerchords, une pointe de grunge. Répétitif et moins d’intérêt finalement. Seul intérêt, la noyade de la voix qui raconte déjà une histoire particulière.
“There’s a Little Passing Cloud in you” marche sur les plates bandes d’un There There. Arpèges répétitifs et rythme “cavalcade”. Nous courrons derrière. Rupture des 4 minutes. Nous glissons dans les bas-fonds. Pour une remontée acoustique des abysses 50 secondes plus tard. Le ciel s’éclaircit. C’était un simple nuage.
Ultime caresse de cet album homéopathique, “Airportism” glisse subrepticement. Nous sommes alors chanceux (Lucky) d’avoir découvert ce groupe aujourd’hui. Point d’orgue.
Une belle surprise. Point.