Chose promise, chose due. Et surtout chose faite. Le 5e album des Kills sorti début juin dernier se devait de passer au détecteur de mensonges du collectif RocknRank.
“Doing it to Death”. Champ magnétique. Electronique. Averse de notes formant un accord. Qui balaie le soleil trop facile. Déversoir de rage dans les cordes. Alison se joue de nous, toute moue dehors. Jamie bombarde, l’artillerie n’est pas fragile. Un majeur de la main gauche inopérant ne l’empêche pas de vaincre. On pense à Royal Blood, Arctic Monkeys, Band of Skulls, the White Stripes. Le riff est construit basiquement sur un saut de corde, à la manière de Can’t Stop des Red Hot. Lumineux et lourd à la fois. Immense et confiné.
“Heart of a Dog” devient groovy. Une basse ondule dans le bas, machinalement. C’était sans compter sans les pêches guitaristiques sales et percussives. Une belle prestation à la voix haut perchée. Un jeu de questions-réponses. Sournois.
Course à l’échalote rythmique, “Hard Habit to Break” décrit une urgence. Ce n’est pas sans nous rappeler l’ère de No Wow. Les couches s’entassent intelligemment. La guitare de Jamie ouvre de nouvelles voies, lumineuses, chaleureuses voire insouciantes. Jeu désordonné des 2 minutes. Rêche et brutal. Un beau bordel.
“Bitter Fruit” est un voile 80s qui cache des racines jazzy. Les Blues Brothers remixés à la sauce Reebok Freestyle. Tou-tou-iou-tout. Hou-hou.
“Days of Why and How”. Introspection, Rayannesque si j’ose dire. Une voix ombrée de reverb jouant à cache-cache dans les coins. Faussement teintée de désarroi, je fuis.
“Let it Drop”. Le compte à rebours est entamé, l’électro secoue. Les graves prennent le pouvoir le temps d’à-coups étonnants. Un titre qui détonne mixant mélodie à la Frozen de Madonna et beat bombastik.
“Hum for your Buzz” est une ballade blues désespérée. Pourquoi est-on dans l’obligation de placer le mot “river” dans ce cas précis? Echo aux racines américaines des bords du Missipi et de la fougue contestataire. Une montée guitaristique en escalier, comme autant de colimaçons bigsby. La fausseté fait partie du jeu. Pour créer une émotion. Gospel. Les orgues s’invitent. Une enveloppe vibrante bienveillante. Et ce son. Quel son!
“Siberian Nights” donne l’alerte. Une scène d’ouverture d’un bon James Bond. Notre héros s’évade, dévale les pistes enneigées dans une course poursuite effrénée qu’il gagnera. Evidemment. Le suspens n’est plus mais l’action excite. Une description assez juste selon moi du titre. La mayonnaise n’est pas ratée (la recette est efficace) mais l’osmose ne se fait pas. Par habitude, peut-être. Par ennui, sûrement. Par facilité, certainement.
“That Love” s’invite alors derrière des rideaux épais de velours poussiéreux. Et la magie opère alors, à la lueur d’un piano désaffecté, d’une guitare dégotée. Ça et là, la boîte à musique s’enraye. Mais cela reste juste et sincère. Prendre le temps de poser les choses. Pour mieux repartir.
“Impossible Tracks” laisse rêveur. La tournerie est précise, directe. Alison est joueuse. Peut-être un jeu d’acteur qui ne résonne pas ensemble. Le synthé gentillet ajoute la légèreté dont nous n’avions pas ici besoin. Oubliable.
“Black Tar” tourne en rond. Ne rembobinons pas.
“Echo Home” convoque Echo le Dauphin dans son habitat naturel sub-aquatique. Le sonar ondule. Les notes se reflètent dans la pureté du bleu graduel des profondeurs. Remonterons-nous à la surface?
“Whirling Eye” évoque la tradition de l’est et ses tintamarres stridents. Sans pour autant évoluer ou nous transporter plus loin.
Un 5e album qui tente de renouer avec l’émotion et le dépouillement vrai. Hormis quelques titres fake ou redondants, les Kills nous offre une galette intéressante rassemblant en son sein de belles pépites. Un son toujours très juste, des idées de riffs puissants et crados, une voix sournoise et charmeuse. Miam. Mais ces pépites sont peut-être noyées dans trop de titres. Quand le plus est l’ennemi du bien. 3 étoiles au global. 5 titres dispensables. Mais 2 titres 4 étoiles. Faites vos jeux.