Suite à la séparation de Kim Gordon et Thurston Moore, 2011 fut l’année de l’arrêt de Sonic Youth après 30 ans de loyaux services bruitistes et déjantés. Cataclysme sur la planète rock alternatif qui retient alors son souffle et se console ensuite en réécoutant les pépites remasterisées. Mais c’était sans compter sur le sursaut solitaire de chacun d’eux. Intéressons-nous d’abord au guitariste chanteur qui s’entoure de Steve Shelley (ex-batteur de Sonic Youth), Debbie Googe (bassiste de My Bloody Valentine) et James Sewards (à la deuxième guitare) pour accoucher d’un album personnel et requinqué.
Une entrée en matière suspendue pour mieux démarrer. 8’29 pour une introduction doucement énergique et gentiment descendante. La guitare se fait anachronique, brute mais chantante. Parfois fausse, parfois ironique, quelques notes répétitives d’un apprenti gratteux. Mais le décor est planté et l’inconnu survient. Voyage lointain avec Tape, vers l’Est et ses régions montagneuses comme pour y puiser une énergie nouvelle, un bon karma. On se surprend à entendre du Pink Floyd. Le voyage continue en terrain connu, l’Amérique, son rodéo et ses racines rock’n’roll. The Best Day emprunte ça et là au rock californien (refrain), au hard-rock 90s et ses solos désuets. Une brève histoire du rock US en 4’29 pour une chanson-single efficace et accessible. Mais sa progression inspirée vaut le détour.
Survient alors une Detonation typiquement punk, comme une ultime rage verbale lancée à la face du monde. Et ce sera la dernière. Vocabularies, Grace Lake et Germs Burn feront la part belle à l’instrumental, l’immensité, les profondeurs, l’apaisement.
Grace Lake mérite une deuxième écoute, pour mieux apprécier sa légèreté première. Des sonorités venues d’ailleurs, une mélodie intrépide: est-ce un tyrolien ou un oiseau-chanteur qui s’invite à nos fenêtres? Le titre progresse rapidement, vers un grand fouilli psyché. Pour mieux retomber encore. Un nuage est passé.
Thurston Moore signe avec The Best Day un retour personnel et digéré. Son jeu de guitare et sa voix n’ont rien perdu au change, toujours faussement imprécis. Les bases de Sonic Youth sont bien là, concentrées et remises au goût du jour – s’il en était nécessaire – par une production plus propre. Mais elles sont portées plus loin, vers des contrées plus spirituelles. Ritournelles confuses mais apaisantes.